mardi 21 avril 2009

Le bûcher après la puja

Bûchers de Holi


Morceaux de bois épars, bouses de vaches séchées ( le principal combustible du Radjasthan ), guirlandes de fleurs, kalams de poudres de couleurs dessinés autours des feux...et le jeune Prahlad sortira indemne du bûcher .

Jodhpur, bûcher de Holi

Happy Holi.


La fête de Holi est surtout célébrée en Inde du nord, c'est une fête dédiée à Krishna , une fête joyeuse connue pour ses batailles de poudres colorées; cette année Holi était fêté le 11 mars et nous avions choisi Jodhur ,la ville bleue du Radjasthan, comme décors . La veille du grand jour Lokesh, le fils de notre hôtesse , nous promène à travers les rues du vieux Jodhpur , pour nous montrer les feux que les habitants préparent aux carrefours pour commémorer l'histoire du jeune Prahlad. La démone Holika voulait le tuer en l'entrainant dans le feu, mais ce fut Holika qui fut brulée et Prahad , s'échappa sans aucun mal grâce à l'aide de Vishnu. Les voisins viennent allumer des branches et des epis à ce bûcher commémoratif , les éteignent et les ramènent dans leur maison en signe de protection. Plus loin une famille de brahmanes prépare un rituel plus élaboré et nous invite à leur puja, puis chez eux une fois le feu consumé.

jeudi 16 avril 2009

de retour

Nous voici de retour apres un long periple au Radjasthan durant lequel il n etait guere possible d alimenter ce blog. Anne est de retour en France depuis hier soir et en ce qui me concerne je reste encore un mois au Kerala pour terminer le projet de film concernant le projet scientifique sur le patrimoine des chretiens de Saint Thomas. j espere pouvoir maintenant publier avec un long decalage horaire quelques apercus de notre voyage

Voilé, dévoilé

De l' Inde je ne connaissais vraiment que le Kerala, ses verts intenses, les lagunes et les canaux qui la parcourent comme autant de routes langoureuses et secrètes. Je connaissais les femmes keralaises, et certaines intimement, leurs saris qui en faisaient autant de fleurs épanouies au bord des routes poussiéreuses, au milieu des voitures, des rikshaw, des motos crachant leur nuage de pollution et les beuglements de leurs klaxons aussi nécessaires à la conduite que l'accélérateur ou le volant.
Je connaissais surtout le sourire éclatant de gentillesse qui répondait au mien, la douceur et la profondeur des regards qui offraient sans crainte le chemin qui mène à la source du coeur.

Aujourd'hui je découvre le Radjasthan et je m'approche d'un féminin tout autre, un paysage inconnu.
Les femmes ici, sont à la fois petites comme de toutes jeunes filles et majestueuses comme des reines. Elles vont, scintillantes de bijoux, et sur le long voile qui les enveloppe je me suis interrogée. Femme occidentale, bien entendu farouchement attachée à la liberté et à l'égalité que nous avons mis si longtemps à acquérir, qu'y avait-il à comprendre pour moi, de ces femmes voilées, dissimulant entièrement ou à demi leurs visages. A mes tentatives de sourire j'obtenais peu de réponse, comme un éclair parfois d'une bouche qui acceptait de se desceller, mais les yeux fuyaient mon regard ou bien restaient aussi infranchissable qu'une muraille défensive.
Ce n'est qu'au bout de plusieurs jours de déception et de frustration, que j'ai eu la chance de rencontrer chez elles, ces femmes jusque là inaprochables. C'est ainsi que j'ai pu apprendre, par gestes, rires et sourires, le secret du voile. Ces redoutables magiciennes en usent avec un art consommé qui se transmet de mères en filles. Entièrement sur le visage, il protège du vent, de la poussière, des regards indiscrets. A moitié ouvert, parfois retenu entre les dents, il ne laisse apparaître qu'un oeil noir de khol, et fait encore plus désirer le visage tout entier. Et si la Radjapoute est lassée de son interlocuteur, elle ramène le voile et se retire à volonté derrière ce léger, mais inviolable rempart.

Nous avons pour nous-même dépassé bien des limites imposées autrefois par l'éducation et la tradition. Nous nous réjouissons avec raison d'une liberté de parole et d'expression auxquelles nous ne pourrions renoncer. Nombre d'entre-nous ont abandonné sur les divans et les fauteuils de nos psys, les fardeaux qui nous encombraient. Nous n'hésitons pas à confier à des lointains plus ou moins proches, l'intimité de notre vie amoureuse ou intérieure.
Du silence emmuré de nos parents et grands-parents, nous voici passés à la parole libérée de toute entrave, parfois de toute pudeur.

Alors, sans chercher à devenir ce que nous ne sommes pas, ce que nous ne serons jamais, pourquoi ne pas réfléchir, ne fut-ce qu'un instant, à ce que peuvent nous révéler ces voiles mouvants qui tremblent sur le visage de ces femmes.

Peut-être pourrions-nous apprendre d'eux qu'il n'est pas toujours utile de révéler au grand jour ce qui demande de l'ombre et de la discrétion. Que le mystère de l'autre autant que de soi-même, a besoin de protection, de solitude et de silence.
Le numineux, le sacré, et je me permets de croire que le féminin en est particulièrement riche, demandent à être voilés, pour donner accès à la l'ultime grotte du coeur.

Je vous écris ces lignes dans la douceur du crépuscule indien. Des aigrettes blanches viennent de se poser sur les branches des arbres qui bordent le jardin. Il paraît que la nuit dernière une panthère se promenait dans les bosquets.Vraiment, l'Inde est le pays de nos rêves d'enfants.




Anne da Costa